Maladie de Castleman : comment en faire le diagnostic
Le diagnostic repose avant tout sur l’examen anatomo-pathologique d’une biopsie, le plus souvent ganglionnaire. Les lésions associent, à des degrés variés selon les formes anatomo-pathologiques, hyperplasie folliculaire, régression des centres germinatifs, expansion ou désorganisation du réseau des cellules folliculaires dendritiques, capillaires hyalinisés, expansion de la zone du manteau, hyperplasie vasculaire interfolliculaire, hyperplasie plasmocytaire interfolliculaire, fibrose périvasculaire ou périphérique.
Certains aspects sont désignés de façon imagée mais ne sont en rien spécifique de la lésion de Castleman.
- L’aspect en « Bulbe d’oignon » ou « Onion-skin » fait référence à l’hyperplasie de la zone du manteau folliculaire
- L’aspect en « Sucette » ou « Lollipop » fait référence aux centres germinatifs pénétrés par des vaisseaux hyperplasiques
- L’aspect en « Menottes » ou « Budding », « Twinning » « Handcuff » fait référence à des follicules pouvant contenir deux centres germinatifs
Début 2017, un groupe collaboratif a redéfini les critères diagnostiques en proposant une graduation dans les anomalies et une actualisation de la classification histologique pour les Maladies de Castleman non associées au virus HHV-8 (David C. Fajgenbaum et al. Blood 2017;129:1646-1657)
La forme Hyaline-Vasculaire ou Hyper-Vasculaire (HV) est marquée par l’importance de la régression des centres germinatifs, les anomalies vasculaires et les anomalies du réseau des cellules folliculaires dendritiques. C’est la forme la plus fréquente des MC localisées.
La forme Plasmocytaire (PC) est marquée par l’importante plasmocytose interfolliculaire alors que les anomalies vasculaires et sur les cellules folliculaires dendritiques sont modestes. C’est la forme la plus fréquente des MC multicentriques idiopathiques.
On décrit des formes Mixtes ou intermédiaires entre HV et PC et en particulier une forme Hypervasculaire avec fibrose observée plutôt chez des patients asiatiques (TAFRO syndrome).
Histopathologic features of CD. Hypervascular subtype is characterized by the presence of regressed germinal centers and FDC prominence, whereas the plasmacytic subtype exhibits hyperplastic germinal centers and profuse plasmacytosis. Mixed subtype exhibits a combination of hypervascular and plasmacytic features. Vascularity is frequently observed in iMCD, but can be seen with either subtype. Bars represent 60 μm (A,E), 200 μm (B-D). (A) Regressed germinal center. (B) FDC prominence in germinal center. (C) Blood vessels penetrating germinal center demonstrate prominent vascularity. (D) Hyperplastic germinal center. (E) Sheetlike plasmacytosis.
La forme associée au virus HHV-8 est superposable à la forme plasmocytaire mais s’en distingue par la présence de cellules « plasmablastiques » infectées par HHV-8 et identifiables par une technique d’immuno-histochimie (LANA).
- Low magnification showing mantle zone distribution of HHV-8–positive cells. (B) High magnification showing stippled and/or diffuse nuclear staining. Inset shows a cell in mitosis; there is localization of HHV-8 DNA to chromosomes by antiLNA antibody. (Nicolas Dupin et al. Blood 2000;95:1406-1412)
Compte tenu des similitudes possibles concernant les anomalies histologiques avec d’autres pathologies. Le diagnostic définitif reste difficile, en particulier pour les formes plasmocytaires multicentriques idiopathiques, et ne pourra être retenu qu’après exclusion d’un certain nombre de pathologies tumorales, infectieuses ou inflammatoires et inclusion d’un certain nombre de critères cliniques et biologiques associés.
Diagnostic différentiel
Pathologie Maligne
Lymphome de Hodgkin
Principal diagnostic à écarter en particulier chez un adulte jeune. La présence, à côté de l’adénopathie biopsiée, d’une masse tumorale plus importante ou plus avide en TEP-TDM doit conduire à une seconde biopsie car adénopathie de Castleman et lymphome de Hodgkin peuvent coexister chez un même patient.
Lymphome non-Hodgkinien
Second diagnostic à écarter pour les mêmes raisons ou devant un épanchement séreux, en particulier dans le contaxte d’une MC associée à HHV-8.
Plasmocytome ganglionnaire
Maladie rare, révélée par l’IHC qui montre que les plasmocytes interfolliculaires de la lésion de Castleman sont monotypiques.
POEMS
Problème particulier. Dans sa forme classique associée à des lésions plasmocytaires malignes osseuses, le syndrome de POEMS constitue un diagnostic différentiel. Toutefois certaines MC peuvent se compliquer de symptômes de la série POEMS (neuropathie, lésions cutanées …)
Sarcome à cellules folliculaires dendritiques
Diagnostic à évoquer devant une forme HV sur l’aspect des anomalies du réseau des CFD.
Pathologie Inflammatoire ou Auto-immune
Lupus érythémateux systémique
L’aspect des adénopathies dans le LES peut être évocateur d’une MC. Si le diagnostic de Lupus est établi, celui de MC n’est pas retenu. En revanche la simple positivité des AAN ne constitue pas un critère d’exclusion.
Gougerot-Sjögren
Situation superposable à celle du Lupus. La simple positivité des AAN et des anti-SSA ou SSB ne constitue pas un critère d’exclusion.
Maladie de Still
Diagnostic différentiel parfois difficile en l’absence de marqueur spécifique de la Maladie de Still.
Toutefois, la pharyngite, les arthralgies, l’éruption fugace et l’hyperleucocytose à polynucléaires sont autant d’éléments plutôt en faveur de la maladie de Still.
Arthrite chronique juvénile
Situation assez superposable à celle de la maladie de Still.
Polyarthrite rhumatoïde
Dans une PR active, les adénopathies en regard des arthrites peuvent avoir un aspect de Castleman.
Maladie associée aux IgG4
Une proportion importante de plasmocytes IgG4 est parfois observée dans la MC. Le diagnostic différentiel de maladie associée aux IgG4 sera retenu devant une présentation évocatrice (atteinte collier salivaire ou pancréatique, fibrose, atopie …)
Pathologie infectieuse
Primo-infection EBV
Les adénopathies de la MNI peuvent présenter des aspects de MC. Le contexte et la séroconversion permettent le diagnostic. Une simple PCR positive n’est pas un critère d’exclusion.
Primo-infection CMV
Situation superposable à celle de la MNI.
Primo-infection HIV
Situation superposable à celle de la MNI.
Primo-infection Toxoplasmose
Situation superposable à celle de la MNI.
Déficit Immunitaire Primitif
DICV
Les adénopathies du DICV sont plutôt de type hyperplasie folliculaires, mais dans certaines formes l’involution des centres germinatifs peut faire évoquer une MC. L’hypogammaglobulinémie permet de réorienter le diagnostic.
ALPS
Ce syndrome associé à un déficit en fas associe hyperplasie lymphoïde, hypergammaglobulinémie et auto-immunité. L’aspect des adénopathies peut évoquer une lésion de type Castleman. En cas de doute l’analyse génétique confirmera le diagnostic.
Déficit en ADA2
Contexte plutôt évocateur de vascularite systémique.
Classification
La classification est basée sur plusieurs critères dichotomiques
1 / Le caractère Unicentrique ou Multicentrique
La forme Unicentrique est la forme la plus fréquente.
Classiquement, un seul ganglion est atteint. L’imagerie, Scanner, IRM ou TEP Scan, permet de confirmer le caractère unique de la lésion.
Dans certains cas, plusieurs ganglions sont atteints mais dans la même aire ganglionnaire.
Il semble que cette situation puisse continuer à être considérée comme une forme Unicentrique, même si les possibilités chirurgicales sont parfois réduites. La forme Multicentrique touche plusieurs aires ganglionnaires avec parfois des localisations extra-nodales (intérêt du TEP Scan.). Une forme particulière est associé à un syndrome clinico-biologique appelé TAFRO.
2/ L’association au virus HHV-8
Une forme particulière est associée au virus HHV-8. La lésion est très proche de celle observée dans les formes Multicentriques Plasmocytaires avec comme signature, la présence de cellules « plasmablastiques » infectées par HHV-8. Cette maladie peut s’observer en présence ou absence d’une co-infection par le HIV.
3/ Le contexte éventuel de l’infection HIV
Dans le contexte de l’infection HIV, la Maladie de Castleman est pratiquement toujours une forme plasmablastique associée au HHV-8.